Mes Critiques de disques Classiques

 

 

Ludwig Van Beethoven

Georg Anton Benda

Christoph Willibald Von Glück

Joseph Haydn

Thomas Linley Jr

Wolfang Amadeus Mozart

Antonio Rosetti

Tommaso Traetta

 


Ludwig Van Beethoven (1770-1827)

 Le grand sourd ...


Symphonie N°2

Symphonie N°5

Symphonie N°7

Symphonie N°9

Choral Fantasy in C minor

Piano Concerto n°5

Missa Solemnis

Messe en Ut Majeur

Meeresstille und glückliche Fahrt

Wellington’s Victory

Fidelio

 

1) Symphonie N°2

 

i) Karajan Berliner Philarmoniker (1977)

 

La plus méconnue des symphonies de Beethoven, et peut-être celle qui le restera, ceci à plus ou moins juste titre. Il est vrai que l’originalité de la partition n’est pas exemplaire, par rapport à d’autres compositions du célèbre autrichien. Karajan en donne ici un interprétation fort honorable, peut-être un brin languissante et maniérée, mais toujours fort juste. On saluera la prestation des cordes des Berliner, rudement mises à l’épreuve ici, qui font montre d’une qualité exceptionnelle.

Une interprétation tout à fait honorable d’un Beethoven peu fréquenté.

 

Note : 15/20 Enregistrement : A-

 

 

2) Symphonie N°5

 

i) Kleiber Wiener Philarmoniker

 

Sans nul doute le meilleur enregistrement parmi une myriade innombrable, de ce qui restera la plus célèbre des symphonies de Beethoven, immortalisé par le film « Le jour le plus long ». De toutes les symphonies, cette 5° n’est pas pourtant la plus originale, mais là c’est une question de goût. Kleiber mène d’un gant d’acier des Wiener Philarmoniker au sommet de leur art, ils connaissent leur Beethoven sur le bout des archets ; on n’aura pas entendu des cuivres aussi brillants, des cordes aussi virevoltantes, des vents aussi présent, un brin de timidité des timbales, une babiole ; la direction est vive alerte, énergique, une prouesse instrument, un déluge sonore, le Wahala a nos portes.

La référence de l a 5°

 

Note : 19/20 Enregistrement : A

 

  

3) Symphonie N°7

 

i) Kleiber Wiener Philarmoniker

 

Le succès ne vient pas toujours. Paradoxalement, là où l’énergie de Kleiber aurait put s’exprimer et s’épancher à ravir, c’est justement là où il n’en est rien. Kleiber semble adoucit, presque somnolant, non que l’on s’ennuie, loin de là, les Philarmoniker sont toujours là pour sauver les meubles, mais il vrai que l’on vibre guère ici, en dépit des innombrables qualités de l’orchestre, en particulier les cuivres, mais la musique passe, s’en accrocher, dommage.

L’interprétation est de qualité mais décevante de la part d’un chef que l ‘on a connu plus percutant dans Beethoven.

 

Note : 13/20 Enregistrement : A

  

ii) Karajan Berliner Philarmoniker (1977)

 

Karajan et Beethoven, la grande histoire d’amour. Cette belle histoire peu amplement être résumée par cette interprétation de la 7°, Karajan se montre sous son meilleur jour : Karajan le fougueux, l’extraverti, le dément. Car il y a de la démence dans cette symphonie, il y a aussi de la fureur, et Karajan y puise toute sa force. Les tempi sont allant, la rythmique a quelque chose de sanguinaire : écoutez l’attaque des cuivres et timbales dans le premier mouvement, un raz-de-marée déferlant sur vous n’aurait pas d’autre effet. L’orchestre est exemplaire de qualité, la percussion est fine et énergique, comme d’ailleurs tous les pupitres, les cuivres sont certes moins grandioses que chez les voisins autrichiens, mais ils ne déméritent en rien, et Karajan sait imposer son image de Beethoven : une violence extrême.

L’interprétation de référence de la plus militaire des oeuvres de Beethoven.

 

Note : 20/20 Enregistrement : A-

  

4) Symphonie N°9

 

i) Karajan Anna Tomowa-Sintow (s) Agnes Baltsa (a)

Peter Schreier (t) José Van Dam (b)

Berliner Philarmoniker (1977)

 

 On ne le dira jamais assez, mais l’intégrale de 1977 dépasse de loin toutes les autres (de Karajan lui-même en premier lieu, mais de ses « camarades » aussi). Comme dans le cadre de la septième, ce qui plane ici est un sentiment d’urgence, une urgence musicale et dramatique. Pas de temps morts, pas de repos, pas d’instants de douceur, même dans l’adagio, l’ensemble de l’ouvrage semble habité par ce sentiment de fin du monde qui motive que tout avance à pas de charge.

L’apocalypse symbolisée par l’ode finale ? Cette ode qui, comme nul part ailleurs, respire tant la joie de vivre, la puissance des hommes (au sens large du terme, les sopranos y allant de bon cœur) enfin réunis par et pour la même cause : la musique. Cette avance militarisante ne sera certainement pas du goût de tout à chacun, on pourrait regretter cette carence de mélodie ; mais l’ultime symphonie de Beethoven en demande-t-elle ? Le maître, finalement sourd, ne voulait-il pas plutôt de la puissance, de l’énergie ? Choix musicologique qui déchirera encore du monde dans une dizaine d’années, d’ailleurs Beethoven était-il vraiment sourd ? ? Ici, c’est Beethoven vu par Karajan, alors écoutons cette vision des choses, et réjouissons nous, car il y a vraiment de quoi. Si on pourrait regretter une légère faiblesse au niveau des cordes, les autres pupitres sont radieux ; et le choeur final, emmené par un quatuor de solistes des plus respectables (avec un Van Dam au sommet de son art, mais où est ce sommet lorsque l’on entends les prouesses qu’il fait encore aujourd’hui ?), est d’anthologie.

Un grand disque pour les uns, trop de partis pris pour les autres. A vous de voir ce que vous préférez chez Beethoven.

Ici, que faire

 

Note : 18/20 Enregistrement : A

 

 

5) Choral Fantasy in C minor

 

De beaucoup voit en cela les prémices de la grande page clôturant la symphonie n°9, il est certes plus qu’évident de mettre en avant les analogies entre les deux ouvrages (dans les mélodies si jumelles entre autre), pourtant l’un et l’autre diffèrent grandement, ne serait ce que dans leur agencement. Cette fantaisie ci s’appuie essentiellement sur le rôle central du piano, et le choeur ne recouvre qu’un caractère anecdotique, relégué à la fin de la composition (4 mn sur 18 mn), même si son intervention est des plus remarquables, et des plus grisantes. On trouve un Beethoven aux facettes multiples, celui des mélodies simples et touchantes, mais aussi celui du grandiloquent et de la démesure.

 

i) John Eliot Gardiner Robert Levin (piano forte)

The Monteverdi Choir

Orchestre Révolutionnaire et Romantique

 

On saluera les qualités d’interprétation du Robert Levin, son doigté et son toucher de piano si sûr et si délicat, et l’on regrettera immédiatement le manque d’ampleur de l’instrument qu’il a choisit, aux sonorités délicieuses mais à l’intensité insuffisante, tant et si bien que les solistes seuls suffisent à le couvrir. On pourrait blâmer une nouvelle fois les preneurs de son, certes il doit y avoir du vrai, mais lorsque l’on sait l’intérêt que DG porte à la qualité d’enregistrement en son « naturel », on ne peut donc qu’en imputer la faute à l’interprête.

L’orchestre de Gardiner (au nom bien creux) est tout aussi excellent que les English Baroque Soloists , et le Monteverdi Orchestra qui le précédait. Il en va de même du choeur, et des solistes qui en sont issus. La direction de Gardiner est juste, et sans imper notable, on aurait néanmoins apprécié un regain de vitalité dans les grands ensembles.

L’ensemble est bien propret, bien net, et se laisse écouter non sans déplaisir. Mais il manque ce qui fait l’essence même de la musique de Beethoven : la passion.

 

Note : 15/20 Enregistrement : A-

 

 

6) Piano Concerto n°5

 

L’œuvre était initialement dédicacée à Napoléon, d’où le sous-titre : L’Empereur, pour l’ouvrage ; mais après l’invasion de l’Autriche par le colonialiste français, Beethoven raya la dédicace de sa partition. Le concerto possède une grandeur toute particulière, habituelle dans les œuvres de Beethoven certes. Le thème principal ne cesse de revenir tout au long de la page, et la dextérité demandée à l’exécutant montre le talent même du compositeur à cet instrument. C’est le plus célèbre des concerto pour piano, et sans doute l’un des plus beaux.

 

i) John Eliot Gardiner Robert Levin (piano forte)

The Monteverdi Choir

Orchestre Révolutionnaire et Romantique

 

Visiblement Gardiner est bien plus romantique et tendre dans ses pages, que Révolutionnaire. Les détails foisonnent, jusqu'à l’excès même, et le tout est emprunt d’une délicatesse, d’un soucis du beau son, de l’élégance qui ne peu qu’exaspérer lorsque l’on attends de cette musique ce qu’elle recèle : une force, une puissance toute beethovienne. Levin est un interprète émérite, jouant de son instrument comme personne, lui aussi s’attachant au moindre reflet de la partition. Gardons donc cette optique de délicatesse, et reprochons seulement à l’instrumentiste le choix d’un forte au son délicat, aux mille facettes, mais à l’ampleur par trop réduite.

L’approche se veut « pacifique », voir « pacifiste » ; tenons le pour dit. Le feu sacré des oeuvres de Beethoven est emmitouflé dans un succulent glaçage ; et jamais l’on n’aura entendu tant de subtilités dans l’ouvrage, les instrumentistes sont exemplaires, et tous les pupitres réussissent à ce faire entendre. Mais est-ce vraiment la bonne vision de Beethoven ? Gardiner n’aurait-il pas justement voulu briser l’image que l’on a d’un Beethoven aux cheveux ébouriffés, braillant à tue tête lors d’une répétition de la 9° ? (Alors qu’il était presque sourd) Mais n’est-ce pas là justement l’image du compositeur ? Chacun choisit son camps, le débat est ouvert ...

 

Note : 16/20 Enregistrement : A

 

 

7) Missa Solemnis

 

L’une des deux messes de Beethoven, et sans doute celle qui a marqué son temps et qui a rendu toute composition ultérieure d'œuvres similaires des plus malaisée pour tous compositeurs. Car ici, tout brille, tout rutile, tout éclate ; et l’on est loin, très loin, des rigueurs que l’on pourrait associer à l’objet du culte. Une nouvelle voix était ainsi ouverte. L’œuvre est monumentale, grandiose, un chef d’œuvre dans son genre, et l’un du grand sourd.

 

i) John Eliot Gardiner Charlotte Margiono (s) Catherine robin (ms)

William Kendall (t) Alastair Miles (b)

The Monteverdi Choir

Orchestre Révolutionnaire et Romantique

 

Gardiner a prit Beethoven comme nouveau cheval de bataille, grand bien lui en fasse si il réussit partout comme il a réussit ici. Car c’est manifestement une réussite que nous avons là. Ce n’est pas une perfection à l’état pur certes, le bémol : les solistes sont justes limite, avec un ténor un peu vide et une soprane peinant dans les hautes notes, mais tous possèdent un tempérament digne des grandes scènes lyriques, côté dramatique que le chef exploite à outrance.

Le choeur est toujours d’une très grande lisibilité, avec une force que l’on ne lui connaissait guère (lui qui préfère si aisément se laisser bercer dans le beau son au détriment de la verve), ce qui est des plus réjouissant. L’orchestre est simplement magnifique, avec des cuivres d’un mordant extraordinaire (écoutez les trombones et les cors), des bois d’une grande tendresse, et des cordes exquises de moelleux.

On comprend que je me suis laissé comblé par cette interprétation des plus réjouissantes et des plus exaltantes. A écouter les yeux fermés, en se laissant emporté par le Tsunami qui se dresse devant nous.

 

Note : 17/20 Enregistrement : A

 

 

8) Messe en Ut Majeur

 

Moins spectaculaire que l’autre messe de Beethoven, celle ci n’en demeure pas moins d’une facture assez impressionnante, mais nettement plus dans la tradition établie. Certains passages ne manquent pas d’inventivité, et il serait heureux de ne pas la laisser dans l’ombre de sa grande sœur.

 

i) John Eliot Gardiner Charlotte Margiono (s) Catherine robin (ms)

William Kendall (t) Alastair Miles (b)

The Monteverdi Choir

Orchestre Révolutionnaire et Romantique

 

Après le succès de la Missa Solemnis, Gardiner reprend la même équipe et se lance dans l’autre ouvrage sacré du grand sourd. Le résultat est peut être moins concluant que dans l’autre cas, mais cela ne saurait être qu’un simple bémol. Choeur et orchestre possèdent toujours une maîtrise parfaite, même si l’impression de raideur du côté des Monteverdi s’est renforcé légèrement, et si les cuivres sont légèrement en recul (mais moins nombreux ici que dans la Solemnis, il est vrai) les autres parties conservent quant à eux tout leur attrait.

Côté soliste, toujours les mêmes griefs, avec en plus un Alastair Miles que l’on pourrait croire bougon tant son empâtement se fait entendre, dommage.

Gardiner est finalement plutôt à son aise dans Beethoven, et nous, nous en sommes fort aise.

 

Note : 16/20 Enregistrement : A

 

 

9) Meeresstille und glückliche Fahrt.

 

Une petite cantate qui sent bon les « Saisons » de Haydn, tant et si bien que l’on pourrait se demander si l’œuvre n’a pas justement écrite par celui-ci et non par Ludwig. Cela commence doucement, puis cela s’enflamme pour s’embrasser entièrement, un régal !

 

i) John Eliot Gardiner

The Monteverdi Choir

Orchestre Révolutionnaire et Romantique

 

Les Monterverdi a leur meilleur, parfait en tout point, tout comme l’ORR, guidé par Gardiner avec tact et intelligence. Comme dessert, c’est exquis et délicieux, alors au diable les calories ...

 

Note : 18/20 Enregistrement : A

 

10) Wellington’s Victory

 

Du Beethoven en Technicolor tout droit sorti d’un film hollywoodien, cela vous dit ? Et bien ne cherchait plus, vous l’avez ici. Cette bataille de Vittoria, ou encore Victoire de Wellington est sans aucun doute l’ouvrage le plus mastondontesque du compositeur : à grand renfort de canons et autres grenailles, Beethoven nous emmène tous droit au champ de bataille. Les fanfares françaises succèdent à celles anglaises, les marches d’un des camps à celles de l’autre, et cela tonne de toutes pars. Un véritable torrent qui avale tout sur son passage où le « Malborough s’en va en guerre « précède le « God Save the Queen » , et où tout s’achève en un déluge musical.

 

i) Lorin Maazel Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks

 

Maazel est-il un bon chef ? Beaucoup le critique, à tort ou à raison, pour ce que je sais de lui ses Puccini me satisfont amplement, pour ce qui est de Beethoven par contre ... A côté de l’enregistrement de Karajan tout en fureur et en puissance (à écouter de préférence sans voisin et toutes fenêtres ouvertes), celui-ci fait bien, mais alors vraiment, bien gentil.

Maazel enchaîne les notes sans grande vivacité (cela avance bien, mais c’est pas le pas de charge tant attendu) et surtout sans grande motivation, où est la bataille ? Là est bel et bien la question. Certes, l’on a pas droit comme chez Karajan, aux « vrais » coups de canons (pas historiquement authentique) et l’on doit se «contenter » de grosses caisses, mais ce n’est pas ce petit changement qui modifie grand chose. On écoute, et on se laisse bercer, c’est beau, mais l’on ne frémit guère.

Les forces allemandes de Bavière ne sont pas fatalement mauvaises, quoique de temps à autres ..., mais rien n’y fait, toute la verve qu’ils peuvent faire montre ne relève en rien le manque d’enthousiasme du chef, qui doit honnêtement guère espérer le nôtre.

 

Note : 11/20 Enregistrement : A 03/02/2001

 

 

11) Fidelio

 

L'unique (si on excepte le prélude que constitue Léonore) œuvre lyrique du grand sourd, un chef d'œuvre pour certain, un coup dans l'eau pour d'autres. Le fait est que Fidelio reste du Beethoven, peut-être pas du meilleur cru, mais certainement pas du plus insignifiant. Un ouvrage unique, dans tous les sens du terme, et une fort belle page que tout admirateur de Ludwig se doit d'écouter, ne serait ce qu'une fois.

 

i) Nikolaus Harnoncourt B. Skovus (b) S. Leiferkus (t)

Peter Seiffert (t) C. Margiono (s)

Laszlo Polgar (b) B. Bonney (s)

Deon Van der Walt (t)

Arnold Schönberg Chor

Chamber Orchestra of Europe

 

Harnoncourt quittant les terres baroques, comme Gardiner à la même époque, s'en allait à la découverte de Beethoven, les symphonies certes, mais aussi Fidelio (parenthèse : les deux chefs ont fait leur intégrale de symphonies, les deux leur Fidelio, et maintenant tous les deux s'attaquent à Verdi, et l'on dit que le clonage n'existe pas ?). On connaît le chef autrichien dans Mozart : énergique, voir survitaminé. Dans Beethoven, l'on ne retrouve pas toujours ces traits de caractères. Harnoncourt sait aussi se montrer doux et faire vivre le drame non seulement par la puissance (qu'il emploie à grand renfort de masse orchestrale) mais aussi par la tendresse.

L'orchestre répond à merveille aux aspirations du chef, et sait se montrer sous diverses facettes, même si la grosse artillerie reste son point fort (écouter ces contrebasses ravageuses), tout comme le chœur qui l'accompagne. Malheureusement ce n'est pas toujours le cas des solistes.

Si le côté masculin n'est constellé que de griefs mineurs : Van der Walt un brin " vert ", Polgar un peu " chewing-gum " ; mais Seiffert particulièrement convaincant tout comme Skovus ; c'est le versant féminin de la distribution qui se retrouve affublé d'une calamité.

Ne parlons pas de la très belle Barbara Bonney, un brin insignifiante mais bien chantante, mais attardons nous sur le cas Margiono, capable du meilleur, ailleurs, comme du pire, ici ... Aigus pris à l'arraché, voix assez terne et dure, la langue allemande ne lui sied donc pas, assurément.

Loin s'en faut, nous n'avons pas là une interprétation d'exception, mais un résultat honnête somme toute, avec surtout la baguette d'Harnoncourt qui mène tout ce beau monde, orchestre survolté en tête, vers le sommet de ce chœur final qui rappelle tant la neuvième.

 

Note : 15/20 Enregistrement :A mardi 20 février 2001

 

 


Georg Anton Benda (1722 - 1795)

 


 

Il fut l’un des maîtres de chapelle luthérien le plus apprécié par Mozart, cela n’a pourtant pas empêcher Benda de tomber progressivement et inexorablement dans les limbes de l’oubli. Un compositeur a ressusciter ?

 

1) Romeo und Julie

 

Le singspiel est joli, mais pas inoubliable, même s’il recèle quelques beaux moments, l’ensemble reste bien timoré, et l’on en ressort ni déçu, ni comblé. Utile, ou futile ?

 

i) Michael Schneider C. Immler (b) H. Kordes (s)

C. McFadden (s) Scot Weir (t)

La Stagione Franckfurt

 

Schneider se fait un plaisir à ressortir de l’ombre certaine partition recouverte de poussière, on ne saura que trop le remercier de cet époussetage. Mais le dicton dit que l’enfer est pavé de bonnes intentions ...

La partition n’est pas magnifique, mais les moments de tendresses (nombreux), et les quelques petites colères (deux ou trois) suffisent pour marquer le coup. Malheureusement, le chef n’a retenu que le côté sentimental (à la limite du sentimentalisme) de ses pages. Les tempi s’étalent comme du beurre sur des tartines, et l’ennui arrive à grand pas. Les rares airs de bravoures perdent tout leur caractère par la mise en place d’un frein à main absolument pas de rigueur, et il faut attendre le dernier duo pour ressentir quelques frissons.

L’orchestre suit parfaitement le chef dans sa lente somnolence, avec quelques limites côtés cordes cependant. Les solistes sont dans l’ensemble on ne peut plus correct, avec un chapeau bas pour le ténor Scot Weir, au timbre un peu vert mais fort agréable.

Simplement correct, pour une œuvre qui peut receler sans aucun doute beaucoup plus que se que l’on nous laisse en entendre.

 

Note : 12/20 Enregistrement : A

 


  Christoph Willibald Von Glück (1714 - 1787)


Armide

Iphigénie en Aulide

Iphigénie en Tauride

 

L’instigateur de la fameuse réforme qui devait conduire l’opera seria sur la voie de l’opéra classique.

 

1) Armide

 

L’opéra, en fait de véritable réformateur, se rapproche beaucoup des ouvrages de Rameau, aussi bien dans le sujet traité, que dans la mise en forme de la musique, et en fait de sonner « Glück », comme les autres oeuvres antérieures (telle Orfeo ed Euridice, ou Alceste), celui-ci sonne très « Rameau » : magicienne, magicien, enfer, démons, haine, et toute la panoplie est de sortie ! Cela tonne beaucoup (chose que Glück ne s’autoriserait pas ailleurs). Et en lieu et place d’un grand bond en avant dans la réforme, on semble assister à un formidable bond en arrière ... N’exagérons pas, l’écriture, même si ce rapprochant de celle de son compatriote par de maints égards, reste bien typique au compositeur ; et l’absence totale de temps morts (récitatifs ...) en est un trait tout à fait remarquable.

 

i) Marc Minkowski M. Delunsch (s) C. Workman (t)

L. Naouri (b) Ewa Podles (ms)

M. Beuron (t) N. Easton (s)

Etc.

Choeur et Orchestre Les Musiciens du Louvre

 

Minkowski comme on l’aime : complètement déjanté, près à tout pulvériser sur son passage. L’orchestre fulmine, explose de couleurs mirifiques, c’est un magnifique feu d’artifice, et pas seulement dans la fosse. Car si l’orchestre est exceptionnel de qualité, et de courage, pour réussir à suivre la direction sur-vitaminée du chef ; les chanteurs sont aussi en grande forme.

Si Mireille Delunsch n’est pas la sorcière que l’on aurait put espérer, elle s’en tire pas mal, un brin cruelle (pas assez à mon goût), un brin humaine (un peu trop ...), et la voix est fort belle. Naouri est splendide de diablerie, et son Hidriot est terrifiant à souhait. Aussi terrifiant, sinon plus encore, est la Haine de Ewa Podles ... elle donne froid dans le dos la brave femme, et nos poils s’en souviennent encore de la toute première écoute, je n’aimerais pas l’avoir en face de moi et en colère ! Si les deux autres sopranos de service (Easton et Masset) remplissent parfaitement leur rôle, donnons un coup de chapeau au ténor Yann Beuron, grand amateur de chant français, au timbre soyeux et chaleureux. On n’émettra des réserves que sur l’autre ténor : Charles Workman, à la voix aigre et rocailleuse, plus bariténor en fait, mais tout à fait à la hauteur de son rôle néanmoins.

Voilà du Glück sous perfusion d’excitants, et cela est fort bien venu. Minkowski et la musique française, une grande histoire assurément, espérons qu’il suive encore longtemps ce chemin.

 

Note : 17/20 Enregistrement : A (Live)

 

 

2) Iphigénie en Aulide

 

L’une des Iphigénie du compositeur, peut être la plus optimiste, la plus belle ? Je vous laisse seul juge. Si l’ouvrage n’est pas en soit transcendant, de superbes moments il nous réservent néanmoins, et les divers ballets qui se faufilent dans ses pages sont autant de petits bijoux placés dans un écrin fort alléchant.

 

i) John Eliot Gardiner José Van Dam (b) A. S. Von Otter (ms) Lynne Dawson (s)

John Aler (t) B. Deletré (b) G. Cachemaille (b)

René Schirrer (b) G. Laurens (s) A. Monoyios (s)

Monteverdi Choir

Orchestre de l’opéra de Lyon

 

Il y a manifestement un son « Gardiner », audible dès les premiers accords de l’ouverture. Le chef anglais recherche toujours un « beau son » qui flatte immédiatement l’oreille, au détriment peut être d’une verve plus affirmée, d’un engagement plus profond. Cette Iphigénie est superbe de beau son, mais la musique n’est pas toujours au rendez-vous.

Si son Gardiner il y a, le copyright est d’ordinaire réservé pour les English Baroque Soloists (ou le ORR) et l’orchestre de l’opéra de Lyon est loin d’être l’équivalent de son collègue « ancien ». Le son est effectivement là, Gardiner restant Gardiner, mais la mise en place de l’ensemble n’est pas sans anicroche. Les approximations sont légions, quels que soient les pupitres, mais heureusement le chef veille, et réussit à tout faire passer sous couvert (y compris les cuivres pas toujours dans le ton ... et très discrets pour le coup). N’abusons pas, l’orchestre est quand même cent coudées au dessus de la moyenne ! Côtés chanteurs, les surprises sont là où on les attendait le moins.

Van Dam est en fait relativement décevant, il lui manque le panache qui lui revient d’ordinaire, et son rôle en pâti considérablement, perdant la grandeur qui lui échouait en toute rigueur. Le timbre est toujours égal à lui même, la beauté de la voix aussi, mais le cœur ni est visiblement pas. Aler a l’aigu un peu nasillard, et le français approximatif dans son accent, mais il possède le tonus qui manquait à son camarade, et pour cela on lui en est grandement reconnaissant. Si l’ensemble des autres protagonistes masculins sont d’un niveau des plus respectables, en particulier Deletré impressionnant de maintient, la bonne surprise provient des protagonistes féminines.

Si on excepte Lynne Dawson, honnête sans plus, mais meilleur que par ailleurs, surtout en français ; les dames sont très à l’aise, et parfaitement dans le ton. Les rôles secondaires sont impeccablement desservit, avec un dièse pour Ann Monoyios, et la grande révélation demeure la Clytemnestre survoltée de Anne Sofie Van Otter (nettement décevante depuis), le timbre est suave et grave à souhait (deux qualités perdues depuis sa course aux aigus) et ne cherchent pas en dehors de sa portée, l’engagement est total, et chacune de ses phrases semble vivre d’elle-même. Une perle ... (vite dépolie ! Quel dommage !)

Gardiner fait vivre la musique juste ce qu’il faut pour ne pas s’ennuyer, mais l’impression que le chef donne à se pâmer devant tel ou tel passage reste malheureusement très ancré. Ne chipotons pas, ce n’est pas parfait question drame et vitalité (Minkowski nous a montré par la suite, ce que cela donné avec son Armide), c’est des plus agréables côtés sonorités (malgré l’absence des EBS), et côté voix cela est extrêmement satisfaisant. Alors en attendant que Minkowski se décide à s’attarder sur ces pages, goûtons avec gloutonnerie ceci !

 

Note : 14/20 Enregistrement : A-

 

 

3) Iphigénie en Tauride

 

Dans la série des Iphigénie, c’est celle en Tauride que nous avons là, moins enivrante que sa petite sœur en Aulide, celle ci n’en demeure pas moins des plus agréables, un brin plus tendre, et plus rêveuse.

 

i) Martin Pearlman C. Goerke (s) Rodney Glifry (b)

Vinson Cole (t) Stephen Salters (b)

S. Baker (s) L. West (s)

Boston Baroque

 

Le chef américain nous avait fait redécouvrir il y a peu une œuvre collective dans laquelle Mozart avait mis un petit grain de sel, et ceci pour notre plus grand bonheur. Pearlman touche ici à la musique française, ce qui en soit est un bien, surtout que cette Iphigénie ci n’est pas celle des plus connues (l’autre non plus d’ailleurs !), mais qui peu s’avérer aussi être une belle calamité si on ne possède pas les chanteurs adéquats, et la French Touch nécessaire.

Pearlman n’a pas tout à fait cette petite « touche » franchouillarde, mais il a suffisamment d’aplomb pour mener sa barque jusqu’au port sans trop de heurts. L’orchestre sonne toujours divinement, et se laisse guider avec entrain et tendresse. Côté solistes, on coince un peu ...

Hormis Gilfry, le français des autres est plus qu’approximatif (même Cole qui a tendance à articuler de manière peu naturelle), détail, certes, mais bon, dans un opéra en français, autant qu’ils soient compréhensibles. Remarquez que cela ne m’aurait pas dérangé de les entendre chanter en anglais (on est plus à une traduction près !). Les voix sont dans l’ensemble assez belle, même si le charme n’est pas le premier don de notre Iphigénie Goerke, ni d’ailleurs l’ardeur ... Elle passe, sans plus. Mais bon. Gilfry est toujours rayonnant (décidément ce chanteur nous laisse beaucoup espérer) tout comme Cole, même si, comme je l’ai déjà dit, son émission semble un peu artificielle et par trop maniérée.

Une interprétation correcte donc, en attendant l’arrivée du prince Minkowski !

 

Note : 14/20 Enregistrement : A

 


 Joseph Haydn (1732 - 1809)

 


L’Infedelta Delusa

L’Isola Disabitata

Orfeo ed Euridice

Orlando Paladino

Missa in Tempore Belli : PaukenMesse

Te Deum (Hob XXIIIc :2)

Die Schöpfung

Armida

 

1) L’Infedelta Delusa

 

Cette charmante burletta per musica est sans aucun doute l’œuvre la plus délicieuse de Haydn dans ce domaine. La musique est d’une jovialité et d’une délicatesse infinies, les situations comiques sont multiples et l’on se prend à sourire, voir à rire chaudement, à de maintes reprises (écouter l’air à boire de Vespina, ou sa crise de « toux » !). La qualité musicale n’est pas mise à mal comme on pourrait le craindre, et c’est là tout l’art de Haydn, comme celui de Mozart, qu’à la plus cocasse des situations trouver une musique d’une incroyable richesse. Ici, tout est rafraîchissement, une grande bouffée d’air frais, et un petit parcours d’embûches vocales pour les solistes, car si l’œuvre a le ton de la comédie, les prouesses exigées par Haydn ne se limitent pas à l’art de la courbette sur scène.

 

i) Kuijken Nancy Argenta (S) : Vespina Lena Lootens (s) : Sandrina

C. Prégardien (t) : Filippo Markus Schäfer (t) : Nencio

Stephen Varcoe (br) : Nanni

La Petite Bande

 

Voici une des plus belles interprétations qui soit, sur instruments anciens qui plus est, de cette agréable comédie. Les chanteurs sont de remarquables acteurs, à une ou deux exceptions près, et le chef sait insuffler à ces troupes un petit quelque chose qui rend l’ensemble d’une subtile cocasserie. L’orchestre est souple, les cordes quelques fois rêches, mais toujours à l’avenant, sautillant, énergique, lascif, suivant les instructions du chef. Celui ci est cependant un peu timoré de temps à autre, préférant prendre son temps, et ainsi alléger le poids qui pèse sur les épaules des chanteurs à certains passages, ce qui fait que certains passages virtuoses chez d’autres passent un peu à plat ici, une broutille. Car ici, nous avons de splendides chanteurs (pas forcément chez les autres !).

Les deux sopranos sont radieuses, et toutes deux délicieuses dans leur diverses interventions burlesques ; les aigus sont souples, pas forcément très haut placés, juste ce qui faut (on aurait put en espérer quand même un peu plus vu le ton burlesque, mais le trait n’a pas voulu être trop forcé.). S. Varcoe possède une voix superbe, un des plus beau baryton de nos jours, une voix douce, velouté, moelleuse, divine ; lui aussi ne pousse pas sur le caractère comique de son personnage, et peine dans son premier air dans les graves tibétains imposés par Haydn, mais le ton est si juste, la voix si belle ... Côté ténor, c’est également ravissant. En dépit d’un timbre ingrat, Markus Schäfer compose toujours des personnages extrêmement justes, surtout lorsque les rôles sont comiques, celui ci lui va comme un gant, et les difficultés vocales auxquelles il s’affronte sont judicieusement éclipsées. La star est sans doute Christoph Prégardien, au maintien toujours royal et à la voix éternellement suave, justement un peu trop suave ici, quelques maniérismes qui auraient pu être évités, et un brin de vaillance supplémentaire n’aurait rendu le plaisir que plus grand ; mais ne l’est-il pas déjà assez ?

Quelques touches de virtuosité en plus, et l’on tenait là une référence, mais l’ensemble n’en reste pas moins d’excellente tenue.

 

Note : 15/20 Enregistrement : A 

 

 

2) Missa in Tempore Belli : PaukenMesse

  

Parmi les messes de Haydn je placerais celle-ci en premier, notamment pour son caractère relativement guerrier (qui se fait particulièrement ressentir dans le Dona Nobis Pace) , qui tranche avec les attributs habituels d’une messe. La Pauken Messe : messe pour timbales, dans sa traduction allemande, Missa in Tempore Belli : messe en temps de guerre pour la version originale ; inspira même Beethoven pour sa Missa Solemnis. Timbales et trompettes se taillent une belle part dans l’orchestration voulue par Haydn, et donnent à l’ensemble un éclat qui, reconnaissons le, masque souvent le caractère sacré de l’oeuvre. Ne nous en plaignons pas, car nous trouvons là l’une des plus originales messes qui nous soit données d’écouter.

 

i) Hickox Nancy Argenta (s) Catherine Denley (ms)

Mark Padmore (t) Stephen Varcoe (b)

Collegium Musicum 90

  

On ne le dira jamais assez, Hickox a du punch, et un sacré tempérament. Mais il n’a pas seulement cela, il a aussi le style, et quel style, très british en somme. Le cycle des messes de Haydn qu’il mène s’annonce comme tout particulièrement intéressant, car l’équipe qu’il a réunit est une équipe, une vraie. Les solistes sont tous d’une perfection presque inespérée, les voix sont chaudes, claires, et toutes leurs interventions sont de purs instants de délices.

Le choeur, omniprésent, se devait d’être engagé, il l’est plutôt dans l’ensemble, surtout les basses dont le tonus se devrait d’être communicatif, entre autres aux sopranos, un peu timorée pour le coup. L’orchestre possède toujours ses sonorités mielleuses que l’on apprécie aux instruments anciens, pourtant une prise de son un peu rêche ne permet pas un épanouissement total de l’harmonie, les timbales semblent un peu voilées, et les trompettes paraissent avoir perdu de leur mordant. Remarques minimes, car il s’agit là d’une des plus belles interprétations de l’ouvrage, et sans nul doute la meilleure sur instruments d’époque, en attendant peut être Pinnock prochainement à qui l’on doit déjà une glorieuse Nelson Messe et une mémorable Pauken en concert lors des Proms 98.

 

Note : 18/20 Enregistrement : B

 

 

3) Te Deum (Hob XXIIIc :2)

 

Le plus enregistré des deux Te Deum composés par Haydn, le plus brillant et le plus grandiose aussi. L’orchestration est l’une des plus riches que le compositeur est mis en œuvre dans l’un de ses ouvrages : timbales, trompettes mais aussi trombones sont de la partie. Un Te Deum dans la lignée de celui de Charpentier, tout en faste et en paillettes.

 

i) Pinnock

English Concert & Choir

 

Pinnock aime tout ce qui tonne, tout ce qui brille, et il montre une nouvelle fois qu’il y est tout à fait à l’aise dans ce monde de luxe sonore. Ce Te Deum est tel un diamant de mille carats lançant ses traits à tout rompre, c’est à peine si l’on réussit à respirer tant la musique nous prends à la gorge ; mais comment font-ils ces chanteurs pour reprendre leur souffle ? C’est un déluge, une tornade, une cascade ... Trouvez tous les superlatifs qui vous chantent. Ecoutez et laissez vous replonger dans le faste des cours d’antan.

Note : 20/20 Enregistrement : A

 

ii) Hickox

Collegium Musicum 90

 

On attendait beaucoup de Hickox, malheureusement ... on l’aurait aimé plus combatif, plus Hickox en somme. Certes il l’est, dopé à la vitamine (d’autres préférant les somnifères cf Harnoncourt) mais cela ne suffit pas. On dirait que tout traîne, que cela avance certes, mais comme au ralentit. Le choeur chante fort bien, l’orchestre (quoique toujours empâté dans une prise de son peu flatteuse) joue bien ... mais non, rien n’y fait, cela sonne creux, vide, flasque ... En somme, tout ce qui peut faire croire à de la musique « légère » ...

 

Note : 13/20 Enregistrement : B

 

 4) Orfeo ed Euridice

 

Voici sans doute le plus étrange des opéras de Haydn, à la fois dans sa structure et dans les circonstances qui lui ont donné naissance. A l’origine, l’œuvre devait être crée au King’s Theatre de Londres (lieu qui vit nombres des créations de Händel un demi siècle plus tôt ; mais pour des raisons de politique musicale (et éviter une débandade semblable à celle connue par la Royal Academy de Händel en raison de l’opéra of the Nobility) le roi n’autorisa qu’une seule scène londonienne à donner des œuvres italiennes : le Pantheon Theatre ; mettant l’œuvre de Haydn au placard. Ce n’est que dans notre siècle que celle ci revit le jour ! L’ouvrage est lui même fort singulier, avec ses nombreux choeurs, sa distribution pléthorique de rôles secondaires (les « corista ») et ce côté Turba antique ; sans oublier son absence de lieta finale. Le premier drame ?

  

i) Hogwood Cecilia Bartoli (ms) Uwe Heilmann (t)

Ildebrando d’Arcangelo (b)

 The Academy of Ancient Music & Choir

 

Reconnaissons que l’intégralité de cette production s’appuie sur un personnage central : l’Euridice tonitruante et déchirante de Cecilia Bartoli, qui est ici, comme à son accoutumé, grandiose de prestance, d’aisance et de beau chant. Mais ce pilier suffit-il pour soutenir l’édifice ? Dieu merci, nous avons Hogwood à la baguette pétillante, emplit d’entrain, et de délicatesse, à la tête d’une phalange qui n’a jamais aussi bien brillé ! Les cordes ont perdu se caractère revêche qu’on leur connaissait, les cuivres et les bois sont toujours égaux à eux mêmes ; et le choeur qui s’y adjoint en cet occasion est tout à fait à la hauteur du travail exigé par le chef.

On regrettera seulement quelques petites choses. Tout d’abord le ténor toujours nasillard de Heilmann, mais très délicat, et aux appoggiatures souvent fort réussis dans leur délicate touche ; ce qui compense beaucoup. Ensuite la basse du signor d’Arcangelo, pas assez tonitruante, trop « joli », manquant singulièrement de nerf, et donc de présence (pourquoi avoir relégué l’excellent Roberto Scaltriti en corista ?).

Le dernier point est somme toute minime : pourquoi Bartoli chante-t-elle aussi le rôle du génie, originellement dévolu à un soprano colorature ? Certes le résultat est probant pour une mezzo (même excellent !), mais la version colorature apporte un côté séraphique bienvenu, surtout que la distribution féminine est dominée exclusivement par le rôle de mezzo d’Euridice. En effet tous les corista sont des hommes, et les interventions des choeurs féminins ne compensent pas le certain déséquilibre existant. L’intervention d’une colorature aurait donc été des plus judicieux. Mais bon, on a quand même Bartoli pour un numéro de plus (et quel numéro !)

Un enregistrement de toute première qualité, avec une multitude de petites imperfections qui ne gâchent en rien le plaisir.

 

Note : 16/20 Enregistrement : A- (Orchestre distant)

 

5) Orlando Paladino

 

« Dramma eroicocomico » voilà ce qui définit l’ouvrage, et pour sûr, il tient des trois à la fois, et surtout des deux derniers. Construit comme un séria « classique », les airs sont tous d’une magnificence extrême, d’une recherche et d’une virtuosité égale, y compris les passages comiques, véritables morceaux de bravoure (cf l’air du « castrat »). Pas une minute l’on ne souffle ici, et l’on comprends pourquoi la légende de Roland (Orlando) a tant passionné les compositeurs, tant les climats à développer peuvent être varié.

i) Antal Dorati Arleen Auger (s) : Angelica Elly Ameling (s) : Eurilla

G. Killebrew (ms) : Alcina G. Shirley (b) : Orlando

H. H. Ahnsjö (t) : Medoro B. Luxon (b) : Rodomonte

I. Trimarchi (b) : Pasquale

Orchestre et Choeur de Lausanne

 

La légendaire intégrale des opéras d’Eszterhazie menée pas Dorati entrera sans aucun doute dans l’histoire. Le son a certes un peu vieilli, on ne chanterait plus Haydn comme cela de nos jours (même si on ne le chante pas assez) on ne le jouerai néanmoins pas mieux. Car Dorati donne à cette musique une verve, une fraîcheur, une consistance à peine imaginable. Il faut dire que le chef s’appuie sur un excellent orchestre, richement fourni en cordes (écoutez les contrebasses !), aux bois délicats, et aux cuivres rieurs. Sa direction sait être tendre, ou furieuse, délicate ou concasse.

Ajouté à cela une brochette de solistes tout à fait « dans le coup », menés tambour battant par un Dominico Trimarchi succulent de truculence, magnifique chanteur qui plus est (encore l’air du « castrat »), et par une Arleen Auger en pleine forme, vocalisant avec légèreté. On regrettera la raideur un peu académique de Ahnsjö et de Shirley (pas très judicieux en Orlando), et le bougonnement de Luxon ; mais il faudrait bien plus que cela pour nous faire regretter un si beau moment.

On ferait sans doute mieux de nos jours question beau son et beau chant, mais malheureusement personne ne répond à l’appel, alors restons ici, cela en vaut vraiment la peine.

 

Note : 18/20 Enregistrement : A

 

6) Die Schöpfung

 

Il s’agit là de l’un des deux seuls oratorios composés par Haydn. (Si l’on exclu les deux œuvres hybrides : Il Ritorno di Tobia, et les Sept Paroles du Christ) On sait que le compositeur fut impressionné lors de son passage à Londres par l’interprétation des ouvrages sacrés de Händel qu’il put alors entendre. Il dit même, selon certaines sources, que la grande marche de procession de l’Arche dans l’oratorio Joshua, était ce qu’il avait entendu de plus beau dans toute son existence. Les deux oratorios font références plus ou moins directement aux ouvrages du « Caro Sassone » : choeurs grandissimes, airs grandiloquents, puissance dans l’évocation des éléments (introduction du chaos, par exemple, mais aussi évocation des insectes, et autres mammifères). La « Création » fut d’ailleurs composé d’après une œuvre anglaise de John Milton : The Lost Paradise, que Händel connaissait et avait refusé de mettre en musique (faute de temps ?).

 

 

i) Frans Brüggen John Mark Ainsley (t) Luba Orgonasova (s)

Joan Rodgers (s) E. Wilm Schulte (b)

Per Vollestad (b)

Gulbenkian Choir

Orchestra of the 18th Century

 

L’œuvre fut longtemps accaparé par des visionnaires romantiques qui ne voyait en elle qu’un ouvrage maçonnique, lui retirant toute sa fougue, son entrain, sa vie même. Or Die Schöpfung, c’est justement la vie et Brüggen l’a très bien compris, signa là ce qui est sans doute un modèle du genre.

S’étant entouré d’une solide équipe de solistes, avec en tête le subliminal John Mark Ainsley, et le non moins terrifiant Eike Wilm Schulte, faisant oublié les quelques travers des autres (en premier les difficultés d’articulations d’Orgonasova) ; le chef mène son ensemble avec une fougue quasi juvénile, mais aussi une puissance incroyable. Qui aurait put croire qu’un orchestre baroque pouvait sonner ainsi ? Les cuivres ne font pas seulement que mordre, ils déchiquettent (les trombones en sont effrayant), les bois cajolent, les cordes flattent. Un régal. Le choeur est excellent de clarté, mais pêche par un léger manque de conviction de ci de là.

Broutilles, car nous avons là un exemple de choix de ce que l’on peut faire avec une telle musique : du plaisir à l’état brut.

 

Note : 19/20 Enregistrement : A (Live)

 

 

 

ii) Christopher Hogwood Emma Kirkby (s) A. Rolfe-Johnson (t)

Michael George (b)

 

The Academy of Ancient Music Orchestra & Chorus

 

« The Creation », en anglais, voilà ce que nous propose le chef britannique, grand bien lui en fasse, car cela nous renouvelle la vision de l’ouvrage par la même occasion, et l’on sait que Haydn lui même aurait voulu qu’il en soit ainsi. Certes les amoureux de la langue de Goethe risque de connaître quelques palpitations, et arguer à tout rompre que cela « sonne » moins bien dans le dialecte de Shakespeare que dans le leur, pour être tout à fait honnête, ils nous pas tout à fait tord. Disons que la « traduction » anglaise (en fait les poèmes originaux de Milton) fait que la musique de Haydn « éclate » moins que dans sa version allemande, et prend plus des côtés de gentille pastorale. Ce n’est pas parce que le texte est anglais que l’écriture de composition y était adapté, l’adéquation avec la musique semble plus évidente en allemand, mais bon, ne chipotons pas, Haydn avait voulu l’entendre en anglais aussi, Hogwood nous en donne l’occasion.

Par la même il s’offre une distribution de choix et un ensemble pléthorique. Côté chanteurs, nous retrouvons les trois « compères » : Emma Kirkby, toujours aussi angélique, mais manquant un peu du panache que certains de ses airs exigent d’elle, elle n’en reste pas moins un ange, et c’est grosso modo ce qu’on exige d’elle ici ! Michael George est toujours aussi performant question « grosse machine », et ses talents d’orateur ne sont plus à refaire. La voix est toujours plaisante, et on lui découvre une certaine vitalité qu’on lui ignorait jusqu’alors, faisant jeu de toutes les subtilités de son instrument. Enfin Anthony Rolfe-Johnson au timbre éternellement soyeux, au phrase toujours si délicat, peut être un peu trop mielleux ici de temps à autre.

Question effectif, Hogwood a rameuté tout ce que l’Angleterre compte comme baroqueux, j’exagère mais presque : 120 instrumentistes et 80 chanteurs, rien moins que cela ! C’est sûr que cela à du caractère (pour ne pas dire que « cela a de la gueule »), et la pâte sonore obtenue est splendide, aussi bien délicate que puissante.

L’on peut donc se dire que tout est réunit pour obtenir l’enregistrement tant recherché, et bien non, malheureusement. Ce qui pêche, c’est sans doute la direction bien trop linéaire du chef, peut être empêtré dans une masse orchestrale trop dense, même s’il en tire le maximum. On perd dans la légèreté au profit du massif, de la puissance, on assiste en somme à une représentation romantique de l’œuvre avec des moyens baroques ... Les solistes ne sont pas mauvais, loin s’en faut, ils sont même excellents, mais ils ne dégagent pas la puissance attendue par le chef et semblent être « anachronique » par rapport au reste.

L’enregistrement n’est pas à dénigrer, il faut plutôt le voir comme une tentative, somme toute réussit, de faire revivre l’œuvre dans sa forme originellement désirée ; mais il est vrai que l’on a mieux ailleurs (mais en allemand). Néanmoins, il faut quand même au moins une fois porter son oreille de ce côté, pour voir ce que l’on peut faire avec un tel effectif majestueux.

 

Note : 14/20 Enregistrement : A

 

 

7) L’Isola Disabitata

 

Le comble pour un compositeur lyrique, c’est de ne pas être reconnu pour ses opéras ... et c’est malheureusement ce qui arriva à Haydn, grand amateur de la scène, et dont les opéras sont peu ou prou complètement oublié. Cette Isola ci est pourtant du premier intérêt, une sorte d’opéra alla Glück pourrait-on dire, vu l’importance que Haydn a réservé au récitatif accompagnato, et le peu d’airs : seulement 6 en tout, et un quartet ! L’ensemble est d’une très grande homogénéité, et la musique ne cesse à aucun instant, néanmoins l’opéra s’inscrit parfaitement dans la continuité des ouvrages du compositeur, entre le buffa et le seria.

 

i) David Golub Susanne Mentzer (ms) Ying Yuang (s)

John Aler (t) C. Schaldenbrand (b)

Padova Chamber Orchestra

 

La surprise ne vient pas de l’est pour une fois, mais de l’Italie. Dans la droite ligne de Dorati, Golub nous offre donc l’une des raretés haydénienne. La direction du chef américain est un brin leste, et un brin pesante, cela dépend des moments ... Mais à aucun de ceux ci, elle s’avère être ennuyeuse. L’orchestre (moderne) de Padoue (et de Vénétie) sonne un peu lourdement, notamment avec des effectifs de cordes mastodontesques, qui tranchent avec l’habitude des orchestres baroqueux. L’on perd en finesse, en vivacité, mais l’on gagne en puissance ; de plus l’ensemble possède de très belle couleurs orchestrales, avec entre autres de charmants violons, ce qui en rend l’écoute des plus agréables.

Le chef a trouver une jolie palette de solistes pour servir cette musique si peu défendue par ailleurs. Si la réputation de John Aler n’est plus à refaire, d’autres sont en passe de s’en forger une similaire. Passons sur Susanne Mentzer au mezzo un peu empâté, mais au timbre ravissant, et attardons nous sur la soprano et la basse.

Christopher Schaldenbrand possède un baryton basse des plus agréables, la voix est habile, le timbre mordant, une vrai découverte. La redécouverte est la délicieuse, et sublime soprano chinoise Ying Huang, découverte dans la Madama Butterfly de Puccini dirigé par Conlon. L’on découvre ici toute l’étendue de l’art de cette chanteuse qui ne cessera pas de nous surprendre de la première à la dernière note. La voix est claire, fruitée, le timbre délicat, mais derrière cette délicatesse une femme de braise se cache, et les couleurs qu’elle réussit à nous offrir dans son second air sont d’une variété prodigieuse. Ce répertoire est pour elle, peut être plus encore que celui auquel elle avait touché jusqu’alors. Un délice !

L’on aurait apprécié plus de théâtre, plus de vie, moins de « délicatesse », mais Golub nous offre déjà une interprétation de premier plan, ne passons pas à côté, c’est si rare.

 

Note : 15/20 Enregistrement : A

 

 

8) Armida

 

Le dernier opéra pour les Esterhazy, un Drama Eroico, qui a un bon goût de seria, avec toujours cette touche qui fait que Haydn reste Haydn, innovateur dans tous les domaines, avec notamment ces récitatifs accompagnés d’une richesse rare. La musique vit de bout en bout, du premier air tonitruant con tromba & pauken qui vous plonge dans le bain dès le départ, au final haut en couleur qui vous laisse coi et un peu sur votre faim. Un très bel opéra où tous les rôles ont de l’importance, et où l’on regrette qu’il ne dure pas plus longtemps ...

 

i) Harnoncourt C. Bartoli (ms) C. Prégardien (t)

P. Petitbon (s) M. Schäfer (t)

Scot Weir (t) Oliver Widmer (b)

Concentus Musicus Wien

 

Harnoncourt dans Haydn, on se souvient de son Orfeo (déjà avec Bartoli) endiablé, on se souviendra de cette Armida de fureur. Harnoncourt fidèle à lui même : au pas de charge, tout le monde, vo far guerra ! Certes, la poésie n’est pas omniprésente dans ces pages, et les « grands » airs se succèdent, mais bon, Nikolaus reste Nicolas, on aime ou pas. Là, on adore : cela cogne (trop pour certains, comme d’habitude ...) cela s’enflamme, cela vit, tout pour le théâtre : comme dans ses précédents Mozart (les meilleurs du moins). Mais une chose change (enfin presque) : Harnoncourt nous gratifie cette fois de chanteurs, des bons, des vrais !

Si les deux seconds ténors sont un peu « discrets », et pas très combatifs, ils sont du plus bel acabit, et chantent tous deux avec grâce et raffinement. C’est malheureusement aussi un peu le cas du premier ténor : Prégardien, en grande forme, toujours royal, toujours un peu chiche en vocalises, et avare en aigus, et qui aurait put gagner en combativité (surtout pour son premier air, explosif), mais toujours excellent dans le phrasé, le maintien, le style : la classe en somme. La basse est plutôt baritonante, et pas très frappante, mais c’est mieux que rien, surtout que la voix n’est pas vilaine. Les deux perles : les deux dames.

Parlons d’abord de Patricia Petitbon, un vrai régal, pur bonheur, avec une voix veloutée, aux aigus susurrés ou percutants (même si la technique de passage reste invariablement la même et tourne au procédé ...), qui nous laisse espérer encore beaucoup de bonheur à venir, et Dieu sait qu’en matière de baroque elle nous a déjà apporté beaucoup, de Scipione de Händel en passant par l’Armida (déjà !) de Jommelli.

Et naturellement, la Star : Bartoli. Peu d’airs malheureusement, mais un vrai rôle de mezzo (alors qu’elle s’était par ailleurs un peu fourvoyée dans des rôles plus aigus) qui rend entièrement justice à sa magnifique voix et nous comble à satiété. Nous sommes au Nirvana !

Ajoutons à tout cela un Concentus qui a un peu perdu de sa désagréable sonorité métallique tout en conservant son mordant, et vous l’aurez compris, on se précipité sur ce petit bijou et vite !

 

Note : 17/20 Enregistrement : A (Live)

 


Thomas Linley Jr (1756 - 1778)


The Song of Moses

A Shakespeare Ode on the Witches and Fairies

 

On l’appelle le « petit Händel », tant sa musique fait penser aux qualités de son aîné. Si le style et la livrée sont quasiment identiques, l’élève n’a pas eut le temps de surpasser le maître, il mourut bien trop tôt, et sa musique, faîtes d’harmonie et de belle ligne, reste assez calquée sur les ouvrages de celui qui fut son guide spirituel, sans pour autant jamais l’avoir rencontré. Un jeune Händel en somme ...

 

 

1) The Song of Moses

 

Ce fut l’un des oratorios composés par Linley, et l’un des plus ambitieux. L’ouvrage, de même base que l’Israel in Egypt de Händel, lui ressemble par maint égard, mais n’en a pas pour autant la carrure, et n’en à pas en outre la prétention. Les choeurs sont nombreux, et possèdent la fougue et l’énergie qui caractérisait la main du Caro Sassone, même si l’écriture est un peu plus maladroite, et le calquage un peu trop systématique (fugue qui suit l’entrée) leur qualité est remarquable et l’Alléluia final semble tout droit sortir de la plume du maître. Les airs dominent néanmoins cette impressionnante partition, non par sa longueur, mais par sa puissance évocatrice. Les parties de cors sont nombreuses, dont dans les airs, tous d’une inventivité extrêmes et d’une beauté rare. Nous ne connaissons que peu de choses de ce compositeur, et il nous en a laissé que fort peu malheureusement, car assurément nous avions là un grand parmi les grands.

 

i) Peter Holman Julia Gooding (s) S. Daneman (s)

Andrew King (t) A. Dale Forbes (b)

Holst Singers

The Parley of Instruments

 

Béni soit Holman et sa manie d’aller pioché dans les ouvrages rares de l’Angleterre baroque et préclassique. Sa collection « L’English Orpheus » mené avec son Parley et avec l’aide de chefs variés, nous permet de découvrir des compositions et des compositeurs rares, trop rares. Ici c’est Linley qui tombe sous sa baguette, et quel bonheur !

Le chef trouve parfaitement sa voix dans cette musique enjouée ou aucun temps mort n’est accordé, le tout semble bondir tel un marsupial. L’orchestre, dont les sonorités auraient peut être put gagner en soyeux mais dont la verve (écouter les cuivres et les timbales) fait plaisir à entendre, est parfait en tous points. Il en est de même pour le choeur, réellement excellent, et fort engagé. La seule ombre a cet idyllique tableau, les solistes.

Si les deux sopranos sont justes acceptables, Julia Gooding soignant pourtant son chant, les autres protagonistes déçoivent. La basse s’emmêle dans les vocalises (certes hardies) de son air, et le ténor a la voix un peu aigrelette, bien dommage ... mais cela reste parfaitement acceptable néanmoins, et ne gâche aucunement le plaisir que l’on retire de cette musique, tant leur conviction nous gagne d’emblée.

Un fort bel enregistrement d’un compositeur à vite découvrir ... rapidement !

 

Note : 16/20 Enregistrement : A

 

 

2) A Shakespeare Ode on the Witches and Fairies

 

Que dire de ce Linley là ? C’est du bon Linley, mais qu’est-ce du bon Linley ? Un peu de Purcell par ci, beaucoup de Händel par là ... Jusqu’au quasi plagiat pour certains airs et choeurs ... Qu’importe, Linley est Linley, c’est à dire un bon compositeur anglais dont toutes oeuvres vaut le déplacement ! A écouter d’urgence, certains passages sont d’une grande banalité, d’autres sont géniaux ...

 

i) Philip Pickett Julia Gooding (s) Helen Parker (s)

Joanne Lunn (s) L. Mazzarri (s)

W. Purefoy (ct) Andrew King (t)

Roderick Williams (b) Simon Grant (b)

Musicians of the Globe

 

C’est dans la série des musicians of the Globe que Pickett nous offre le second enregistrement au catalogue de cette ode. On connaît le chef anglais friand de nouveauté et surtout de terrain vierge où planter son propre grain de sel. Ici, on ne plante rien, on se contente donc de laisser pousser. Cela n’est pourtant pas sans risque, surtout en pays sec ...

La première chose qui nous frappe c’est l’homogénéité des chanteurs, pas au meilleurs sens du terme néanmoins, en cela que les sopranos, comme par ailleurs les deux basses sont peu différentes, et parfaitement interchangeables. Saluons pourtant Julia Gooding, apparemment grande supportrice de ce répertoire (elle a participé à tous les enregistrements d’oeuvres du compositeur au catalogue !), à l’aigu toujours aussi peu assuré, mais au timbre mignon. Saluons encore plus Helen Parker, qui nous ravie lors de ses nombreuses interventions. Du côté masculin, les deux basses sont honnêtes, avec une certaine tendance pour Roderick Williams à nous parodier David Thomas ...

La baguette de Pickett aurait put être plus légère, plus allègre, on assiste à quelques longueurs, mais aucun dérapage sérieux. La phalange orchestre mise à sa disposition est du plus bel effet, et sonne au mieux, y compris le choeur d’une belle cohérence.

Un peu plus de vie, des chanteurs un peu plus « dans le coup », et cela aurait été merveilleux, nous nous contenterons donc de quelque chose de fort agréable, de tout à fait recommandable en somme.

 

Note : 14/20 Enregistrement : A

 


Antonio Rosetti (1750 - 1792)


 

1) Sinfonia in D « La chasse » (Kaul I :18), Sinfonia Kaul I : 21-22-30

 

i) Concerto Köln

 

Que se soit sous la baguette émérite de Jacobs ou seul, le Concerto Köln nous ravit à chaque fois, et c’est une nouvelle fois le cas dans ces pages bourrées de vitalité et d’inventivité. Rosetti est loin d’être un compositeur « connu » et « reconnu », pourtant ses symphonies regorgent d’une joie de vivre, d’une richesse musicale, que peu de ses contemporains (Haydn et Mozart compris) ont développées. Chacune de ces pages ressemblent plus à un grand concerto pour multiples instruments solistes, tant tout un chacun est mis à contribution de manière incessante, et même des fois fort surprenante.

On appréciera la rythmique toujours aussi impeccable des instrumentistes et les belles sonorités que l’orchestre peut déployer, notamment dans l’extraordinaire symphonie surnommée « La Chasse » où c’est un véritable déluge sonore qui nous enivre jusqu'à plus soif. Une interprétation survitaminée, comme à son habitude, de pages qui valent vraiment de s’y attarder, et même d’y demeurer.

 

Note : 20/20 Enregistrement : A 2/02/2001

 


Tommaso Traetta (1727-1779)


 

1) Antigona

 

Reconnaissons que malgré tout son talent, Traetta n’est pas un Mozart, ni même un Glück, et que la verve n’est pas son fort, les mélodies d’une joliesse infinie s’enchaînent, mais rien n’est mémorable, et l’on ne ressent le drame que de manière très épisodique. Une musique agréable, mais pas transcendante, et en rien inoubliable.

 

i) Christophe Rousset Marai Bayo (s) A. M. Panzarella (s)

C. V. Allemano (t) Laura Polverelli (ms)

Gilles Ragon (t)

Choeur de Chambre Accentus

Les Talens Lyriques

 

L’opéra réclamait pour le sortir de l’oubli une vigueur et un entrain, un souffle héroïque, qui fait malheureusement cruellement défaut ici. Rousset n’a fait que ressortir la beauté des airs, sans mettre en avant le drame lui même, sans y trouver un moindre souffle de tempête que certains airs, même peu emportés, à l’inverse de chez d’autres compositeurs, pouvaient néanmoins exiger. On aurait put le vouloir un peu plus rageur, il n’est que contemplatif. C’est beau, certes, mais c’est tout.

Dans l’ensemble chanteurs et instrumentistes sont bien dans le ton et de bonne compagnie. On excusera la soubrette Maria Bayo aux aigus clairsemés et avares, aussi peu engagée dans son rôle que l’on aurait put le redouter, on passera Allemano, belle voix, mais savonnant au possible des vocalises pourtant guère vindicatives, on regrettera le peu d’intervention de Ragon et Polverelli, on survolera Panzarella, bel organe, mais pas accrocheuse pour deux sols, et on saluera le choeur séraphique (un brin soporifique à la fin) d’une maîtrise totale et d’une fort belle tenue.

Reste l’orchestre, que l’on gratifiera d’une belle sonorité et d’un grand maintien, et l’on pardonnera au chef ses écarts « Gardinérien », préférant le beau son à la vie ... Remarquez, il y a la superbe acoustique de la salle de l’Arsenal de Metz, qui nous laisse bien plus rêveur que les protagonistes de ce drame édulcoré.

C’est beau, c’est joli, cela se laisse écouter, dans le fond, on dirait presque que c’est bien.

 

Note : 14/20 Enregistrement : A+

    

 

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